Nature

Grande campagne du moineau : la plus grande famine de masse de l’Histoire

Par Antoine Delacour , le mercredi, 31 juillet 2019, 11h05 , mis à jour le mercredi, 31 juillet 2019, 11h05 — oiseaux
Grande campagne du moineau
image crédit : Pixabay

En 1958, le dictateur Mao Zedong ordonna l’élimination de tous les moineaux, ce qui provoqua la mort de millions de personnes.

Nous avons connu de nombreuses catastrophes écologiques, mais rarement aussi graves que celle qui a commencé en 1958. Cette année là, Mao Zedong décida que la Chine pouvait se passer des moineaux, qu’il qualifiait de parasites pour les récoltes. Néanmoins, cette décision ainsi que d’autres politiques mises en place eurent un effet domino destructeur. En effet, trois ans après, cela aurait entraîné la disparition de 45 millions de personnes.

Tout a commencé neuf ans après la prise du pouvoir par le Parti communiste chinois. Cette année-là, Zedong lança le « Grand Bond en avant », une vaste campagne sociale et économique qui, entre autres, transforma l’agriculture en une activité collective parrainée par l’État.


L’une des premières actions de Zedong après la collectivisation de l’agriculture fut de protéger les fermes. Comme on lui avait rapporté que chaque moineau mangeait en moyenne 4,5 kg de céréales chaque année, Zedong ordonna aux gens d’exterminer tous les moineaux. Son raisonnement était simple, plus on tuerait de moineaux, plus on aurait de céréales pour nourrir le peuple chinois.

Ainsi, pendant la grande campagne du moineau, des centaines de millions de moineaux furent tués, mourant principalement de fatigue à force d’être pourchassés dans le ciel. La campagne faisait partie de la « Campagne d’élimination des quatre fléaux » qui visait à améliorer l’hygiène humaine.

En 1960, il devint évident que l’élimination des moineaux était un désastre.

Les moineaux ne mangeaient pas seulement des céréales, ils se nourrissaient aussi d’insectes. Comme il n’y avait plus de moineaux, on observa une explosion des populations d’insectes comme les moustiques. Et les criquets, en particulier, ont envahirent le pays, dévorant tout sur leur passage, y compris les cultures destinées à l’alimentation humaine.

Les gens manquèrent rapidement de nourriture, conduisant à des millions de morts. Selon le gouvernement chinois, le bilan s’élèverait à 15 millions de morts. Mais certains chercheurs estiment que le nombre de victimes aurait atteint 45 voire 78 millions de personnes. Le journaliste chinois Yang Jisheng, qui a parlé la famine dans son livre « Stèle : la grand famine en Chine 1958-1961 », estime les morts à 36 millions de personnes. (Le livre est interdit en Chine.)


« Des documents rapportent plusieurs milliers de cas où des personnes ont mangé d’autres personnes », a déclaré Yang . « Les parents mangeaient leurs propres enfants. Les enfants mangeaient leurs propres parents. » Le comportement était tellement inhumain, avec des milliers de personnes assassinées pour avoir mangé ou pour avoir dénoncé le gouvernement, que plus de 50 ans après, ce sujet reste toujours tabou en Chine.

Ce qui est probablement le plus tragique, c’est qu’on aurait probablement pu éviter la majorité de ces décès. Même si les champs étaient vides, les grands entrepôts de céréales contenaient suffisamment de nourriture pour tout le pays, mais le gouvernement n’a rien fait.

Une série de tragédies

L’élimination des moineaux n’a pas été le seul facteur conduisant à la famine, aux meurtres et aux décès. Tout d’abord, il y a eu une grande sécheresse en 1960. Par ailleurs, le gouvernement central a mis en place de nouvelles pratiques agricoles qui se sont avérées désastreuses. Le véritable responsable était le gouvernement communiste, qui empêchait les céréales d’être livrées à ceux qui en avaient besoin et couvrait le problème. Il a aussi aussi détenu, battu et pourchassé sans relâche, tous ceux qui semblaient remettre en question le système.


La Chine a toujours minimisé les causes et les effets de la grande famine, encore connue officiellement sous le nom de « Trois ans de catastrophes naturelles ». Yang a déclaré au The Guardian  que la vérité ne serait jamais révélée en Chine continentale, du moins pas officiellement. » Comme le parti s’est amélioré et que la société s’est améliorée et que tout va mieux, il est difficile pour les gens de croire à la brutalité de cette époque. »

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Antoine Delacour

Comme de nombreuses personnes, cela fait des années que j’essaie de limiter mon empreinte carbone en triant mes déchets, en empruntant le plus possible les transports en commun et en limitant au maximum le plastique. C’est un bon début, mais je pense que tout ceci n’est pas suffisant car nous ne réglerons pas le problème en nous contentant de faire cela.

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Commentaires

Le mercredi, 31 juillet 2019, 16h34 à 16h34, André SCANGA a dit :


L'histoire de millions de moineaux provoquant des millions de décès d'humains parait incroyable au départ, mais la suite de l'article nous éclaire un peu plus sur le sujet. Pourquoi en parler seulement en 2019, d'une part, est-ce véritablement historique, d'autre part.


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